Malo Evangeline Moriarty-Danson

« Et elle descendit moelleusement son escalier de nuages et passa sans bruit à travers les vitres. Puis elle s'étendit sur toi avec la tendresse souple d'une mère, et elle déposa ses couleurs sur ta face. Tes prunelles en sont restées vertes, et tes joues extraordinairement pâles. C'est en contemplant cette visiteuse que tes yeux se sont si bizarrement agrandis; et elle t'a si tendrement serrée à la gorge que tu en as gardé pour toujours l'envie de pleurer.. »

Nom • Moriarty Prénom(s) • D'aabord y a Malo et puis y a Evageline Date de naissance • Quinze juillet Âge • Vingt-deux ans Métier/Etudes • Dessinatrice pour enfants Statut Social • Heureuse épouse d'un inconnu Avatar • Maggie Grace Groupe • I'm better off without you Crédit • tumblr

QUALITÉS naturelle passionnée engagée souriante sensible créative DÉFAUTS lunatique colérique sauvage calculatrice tête en l'air rancunière HOBBIES les causes perdues le dessin la nature les bouquins, surtout ceux qui finissent mal courir pieds nus dans l'herbe les manifestations pour la protection des animaux PRÉFÉRENCES végétarienne depuis l'âge de 6 ans déteste les jeux de ballon lit encore des romans pour adolescentes déteste se retrouver seule chez elle aime marcher sous la pluie

Questions pour les enfants

Quelle relation entretenez-vous avec vos parents ? Je sais pas, des relations on ne peut plus normales je suppose. Le dimanche midi, je vais manger chez ma mère, parce qu'elle tient a s'assurer que je continue à manger des protéines. Mais depuis l'accident d'Harry, j'y vais de moins en moins. Souvent, le dimanche, je suis plus là. Parce que ma mère au moment du dessert, elle s'enferme dans la salle de bain pour pleurer. Et puis mon père, il parle pas. Il râle en lisant les résultats du tiercé. Les choses ont changé, c'est tout.

Quel a été votre plus grand conflit ? Ado, je me souviens d'une dispute complètement idiote, parce que ma mère avait refusée que je sorte. Je me souviens plus vraiment la raison, surement a cause d'une mauvaise note en maths ou un truc comme ça. Rien de grave. Mais j'avais hurlé contre ma mère, lui crachant au visage un venin que j'ai longtemps regretté. Et puis, ce soir là, je m'évadais par la fenêtre avec la complicité de mes frères. Ouais, j'ai passé trois jours sans parler ma mère pour une connerie, une histoire sans intérêt. C'était pas grave mais c'était le plus grand. Ou du moins le plus grand dont je me souviens.

Quel est votre meilleure prétexte pour une sortie ou de l’argent ? Les cours bien sûr. Mon père, je lui racontais tout un tas d'histoires, de sorties pédagogiques organisées sur des week-end, tout ça. Et il y croyait. Parce qu'il voulait que je réussisse, et que les week-end révisions, il trouvait ça bien comme idée. Alors oui, le meilleur moyen de berner ses parents, c'est de leurs faire croire qu'ils prennent les décisions, les bonnes décisions même.

Quel a été le moment le plus embarrassant dans votre vie d’enfant ? Ma première fois. Parce que non, ma mère n'a rien vu. Mais ma mère le lendemain, elle savait. Bordel, je sais pas comment mais elle savait, et pendant deux heures, je suis restée assise a la table du salon, son regard posé sur moi, ses doigts fripés déroulant des préservatifs le long des balades achetées le matin même au marché. Embarassant, c'est ça. Drôle même. Parce que ma mère dans le fond, elle a jamais été super pédagogue.

Quelle est votre meilleure combine pour sortir en douce ? Harry. Parce qu'Harry, mes parents lui faisaient vachement confiance. Du coup, si je criais un peu partout que je passais la soirée entourée du prince Harry et du général Jaimie, je pouvais vivre ma vie comme bon me semblait. Parce qu'avec eux, on me croyait en sécurité, moi, Malo, la fille, la petite dernière. Alors ils étaient mon moyen a moi de partir en douce par la fenêtre.

Comment on fait les bébés ? T'es sérieux ? Moi ma mère pour m'expliquer quand j'étais môme, elle m'a offert l'encyclopédie illustrée de l'éducation sexuelle. Des bonhommes, des coeurs, des bébés partout. j'avoue, j'y ai rien compris. Et puis ma mère quand elle voulait en parler, elle s'emmêlait, trouvait pas vraiment ses mots. Alors les bébés, ça se fait comme dans les livres, avec des coeurs et des cignones.

My Story

"Et s’il faut que chaque jour
je devienne soleil
pour éteindre la nuit
pour éclairer ton ciel."

Deux avril dix-neuf cent quatre-vingt seize.

Lutin. Lutin c'est le nom de mon chien. Maman dit qu'il serait temps qu'il arrête de perdre ses poils. Moi je trouve ça drôle. J'aime bien glisser mes mains dans sa fourrure, et en ressortir d'épaisses poignées crasseuses. Parce que Lutin il aime la boue, comme moi. J'aime les nouvelles chaussures que m'achète maman, celles qu'elle m'offre fièrement. Oui, ma mère c'est quelqu'un de fière. Comme moi. je suis un mélange de Lutin et de ma maman. Parce qu'après avoir fait goûter la boue a mes sandales, oui, je suis vachement fière de les montrer a maman. Alors elle cri. C'est idiot. Et puis, y a Harry qu'arrive. Harry c'est mon grand frère. Et puis y a Jaime, mon petit frère. Ils ont l'air bêtes, dans leurs maillots de foot. Mais papa dit qu'un garçon doit passer par le football pour devenir un homme. Je suppose que moi faudra que je passe par la cuisine pour devenir une femme. Tant pis, je serais jamais une femme. Je serais un chien comme Lutin. Ou alors un poney. Alors harry, quand il arrive, bah il raconte. Les buts, le gardien de l'équipe adverse qu'était vachement doué ! Ou alors mon frère qu'est pas assez doué lui. Ouais parce qu'il est meilleur pour raconter des histoires Harry. Ou alors pour faire des dessins. Parce qu'Harry il dessine bien, ouais. C'est un peu un artiste, mais en mieux vu que c'est mon frère. Alors je m'assoie dans l'herbe, la tête de Lutin sur les genoux, et puis je cueille de l'herbe. Parce que si je deviens un poney, faudra que j'en mange de l'herbe. Et puis, je trouve ça important, l'herbe. Et puis les oiseaux aussi, ou alors les écureuils. Malo, Harry, vous venez goûter avec Jaime ? J'aime bien le goûter. Parce que souvent après le goûter, maman elle nous raconte des histoires.

Vingt-trois aout mille neuf-cent quatre-vingt dix-huit ; 10h34.

Assise a l'arrière de la voiture, mon jean au bout des pieds, je pousse un dernier soupir avant de le remonter jusqu'à la taille. J'ai jamais trop réussi a m'habiller à l'arrière des voitures. Alors Harry depuis le rétroviseur, je le vois sourire. Idiot. Je me moque pas de ta femme a toi. De l'espèce de balais qui te sert de nana. Parce qu'elle rigole pas, elle sourit pas non plus. Elle parle des produits de beauté qu'elle vend dans son salon. Miss beautée. Madame parfaite. Et puis mon frère. Mon Harry. Celui que j'aurais imaginé marié à une immigrée polonaise, histoire de lui offrir une jolie vie. Parce que mon frère est un prince. Prince Harry. Ah ah. Alors à l'arrière de la voiture, je me redresse pour enfiler mon tee-shirt. J'y peux pas grand chose moi, si les mariages ils tombent toujours aux mauvais moments. J'avais du boulot. Des papiers et des bouquins a ranger. Et puis une pause clope a caler entre deux bouquins. Tu vas y aller comme ça ? Princesse parfaite vient de tourner la tête vers moi, détaillant du regard le débardeur à rayures que je viens d'enfiler. Tiens, mets au moins ça, t'auras l'air un peu plus présentable. Traitresse ! Et le droit des femmes ? Et le droit des baleines sale sorcière ?! Parce que du bout de ses doigts parfaitement manucurés, elle me tend son rouge à lèvres. Rouge ketchup. Un truc comme ça. Alors d'un geste de la main, je refuse. Je tue pas les baleines moi. Je mange pas de viande non plus. Les oeufs, ça passe, mais seulement parce que le dimanche, maman insiste pour que j'ingère mon taux de protéines. Tu sais ce qui me tue Malo ? C'est que même comme ça, t'es jolie. Elle détourne le regard et fixe la route. Harry, je le vois bien, il sourit. Bah mince. C'est quoi ce truc ? Elle fait une indigestion de chocogrenouilles miss parfaite ? Et zut, je sais pas comment m'excuser. Il est chouette ton gilet. En fait non. J'aime pas la couleur. J'aime pas non plus les paillettes. Mais ça lui va bien, ça lui ressemble. Dans le fond, elle est pas méchante. Alors Harry il glisse la main autour de la sienne. Je déteste les mariages.

Vingt-trois aout mille neuf-cent quatre-vingt dix-huit ; 10h46.

Harry, faut faire demi tour, y a Jaime qu'a décidé de venir, faut aller le chercher a la gare. Le téléphone entre les doigts, je souris. Je souris parce que Jaime, petit Jaime va nous rejoindre. L'équipe de choc. Mes frères ces héros. Devant, sur le siège passager, madame Harry a retiré sa main de celle de mon frère pour pousser un soupir. Je sais bien qu'elle ça lui plait pas, de faire demi tour, et de dépenser encore de l'essence pour un Moriarty. D'abord, moi, et puis Jaime. Ca l'énerve comme ça l'énerve quand on se retrouve tous les trois pour les repas de famille. Parce qu'Harry parle pas beaucoup, mais Jaime, lui, il raconte toujours tout un tas d'histoires. Des voyages, des femmes, les photos qu'il fait. J'aime l'écouter parler. J'aime observer Harry l'écouter. Parce qu'ils ont toujours été proches. Comme deux frères. Deux gamins qui portaient les même couleurs sur leurs maillots de foot. Ils me font sourires. Alors là dans cette voiture, j'ai l'impression d'être une gamine, une enfant. Et puis Harry, je le vois qui sourit. Il est heureux. Il va le retrouver, son Jaime, notre Phileas Fogg. Alors il ralentit. Peut être un peu trop. Il ralentit, clignote a droite. Demi tour. Et puis y a la voiture qui se dessine trop vite sur la droite, la voix d'Harry, celle de sa femme, et puis le trou noir.

Quatorze janvier deux mille ; 14h01.

Assise sur le banc, je tourne la page avant de reprendre l'histoire. J'ignore si il m'entend. Le regard dans le vague, les mains agrippées aux poignées de son fauteuil, je sais même pas si il entend. Les médecins disent que oui. Ils disent que ça va l'aider a retrouver la mémoire, qu'il retrouvera son autonomie. Mais bordel, il retrouvera jamais rien Harry. Ca fait presque deux ans qu'il est là, cloué comme un légume. Et ça fait deux ans que je viens ici, m'asseoir sur le banc quand il fait beau, parce qu'Harry il aimait le soleil. Ouais, il aimait les oiseaux. Alors je termine ma page, et puis le livre, je le referme. J'ai l'impression de parler a un enfant, alors que les enfants, j'aime pas ça. Je raconte des contes pour enfants. Des contes de fées, comme ceux qu'il me lisait quand j'étais gamine. Allez Harry, écoutes moi ! Allez Harry, réveilles toi. Parce que parfois, quand j'arrive ici, je me surprends a espérer qu'en rentrant dans sa chambre, il m’accueillera en souriant, et puis qu'il me prendra dans son bras. Lui, Harry, mon héro. Alors je me lève, le bouquin posé sur les genoux de mon épouvantail de frère. Je déteste pousser ce fauteuil. Je déteste ces vieux qui déambulent dans les allées. Je déteste ces femmes en blouses blanches qui s'approchent pour demander si tout va bien. Allez Harry, on s'arrache. Tout s'est bien passé ? Sourire forcé. Pourriture. Je déteste les infirmières. Elles se donnent toutes le mot pour voler mon frère. Mais c'est le mien. Seulement le mien a présent. Mon Harry. Alors quand elle récupère le fauteuil et s'éloigne, je laisse mes doigts glisser jusqu'à la cicatrice sur mon front. Il ne comprend plus, il n'écoute plus, et moi je continue de sauver les baleines.

Treize septembre deux mille onze ; 22h18.

Je fuis parce que j'ai la trouille. Ouais, j'ai la trouille quand je parle à Jaime et qu'il me dit que non, il ne reviendra pas, j'ai la trouille quand ma mère se met a pleurer pendant les repas du dimanche, j'ai la trouille quand je rentre dans la chambre d'Harry et qu'il a toujours pas bougé. Ouais, toujours pas.

Alors oui, je bois. Je me noie dans l'alcool, mes doigts jouant avec une olive imbibée de tequila. Je soupire, j'inspire. Bordel, c'est le bordel. Je voudrais partir quelque chose comme super loin. Balancer ma vie, en choisir une autre. Chez Schmitt on crée sa cuisine, je voudrais pouvoir faire pareil. Balancer la plan de travail, changer de lave vaisselle. Te mon doigt libre, je dessine un ours en peluche sur un coin de serviette. Parce que c'est tout ce que je sais faire. Sauver les pandas et dessiner des animaux idiots pour des gamins qui tournent les pages beaucoup trop vite. Alors quand le type là, il s'installe à côté de moi, c'est comme s'il venait foutre un coup de pied dans ma vie. Il a la tronche du mauvais garçon, l'allure du type qu'on regrette d'avoir rencontrer. Mais y a quelque chose chez lui. Un truc dans son regard. Une façon de jouer avec ses doigts, de parler comme si il en avait rien a faire de rien. Je réfléchis trop, il réfléchi pas assez. Je voudrais tout calculer, il calcul rien. Moi je rêve alors qu'il pue le réalisme. Ouais, je sais pas qui il est mais rien a voir avec moi. A part peut être la bague à l'index qu'il portera comme moi demain matin. En attendant, je bois. Parce qu'après tout, faut oublier.

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